En préparant l’itinéraire de ce voyage, à chaque fois qu’on évoquait les pays d’Asie qu’on souhaitait visiter, on en oubliait systématiquement un : le Bangladesh. Peu de récits de voyageurs et un statut de pays très pauvre-surpeuplé-en proie aux catastrophes naturelles anéantissent les envies de la plupart des touristes. Plus nous avancions en Asie et plus ce manque d’informations attisait notre curiosité et devenait une raison suffisante pour aller voir par nous-mêmes de quoi il en retourne. Au retour du Myanmar on prend donc nos billets pour Dhaka, la capitale du Bangladesh.
Formalités d’entrée
Pour pouvoir embarquer sur le vol, j’ai du bidouiller une fausse réservation de billets qui prouve qu’on ne projette pas de s’installer au Bangladesh. Le type chargé de notre enregistrement vérifie tous les détails. Ça prend du temps. On commence à paniquer et on imagine déjà se faire refouler. Angoisses. Finalement, tout se passe bien mais on aura jamais autant stressés avant de prendre un avion !
On était les seuls touristes du vol donc pas d’attente pour pouvoir faire nos visas à l’arrivée. Nos noms et nos numéros de passeport sont inscrits à la main dans un gros livre. Le type qui est chargé de nous délivrer les visas nous proposent 25 jours de validité alors qu’on paye pour 30. On accepte sans rechigner. On réalise juste après qu’on devra sortir du pays plus tôt que prévu.
En sortant de l’aéroport on monte dans un taxi qui nous conduit à notre hôtel. Point de départ de l’immersion bangladaise. Chaleur. Klaxons. Embouteillages monstres. Conduite agressive et hasardeuse. Bus défoncés et bondés. Des gens partout. Vraiment partout. Il est plus de 22 heures mais ça grouille de monde partout où on pose les yeux. Pas de doute, nous voilà dans le pays le plus densément peuplé au monde (si on exclut les tout petits états).
Repos et nouveaux repères
Un peu abasourdis par le choc de cette arrivée dans un nouveau pays où nous n’avons, pour le moment aucun repère, il va nous falloir quelques jours pour souffler et trouver nos marques. Ici, ça n’a rien à voir avec l’Asie du Sud-Est qu’on a laissé derrière nous. Le Myanmar et le Bangladesh ont beau être voisins, il y a un monde entre les 2 pays. Les gens ressemblent d’avantage à des indiens qu’à des birmans. Et ils sont très, très nombreux !
On n’est pas du tout habitués à cette densité de population qui peut parfois être oppressante, et chaque sortie dans les rues de Dhaka nous demande un effort d’adaptation. On se faufile entre les voitures, les gens, les travaux et les autres moyens de transport. Ça prend du temps, c’est fatigant. Donc on y va petit à petit, en essayant de se familiariser avec cette vie grouillante constituée d’humains et de véhicules, mais aussi de nouvelles odeurs, de nouvelles sensations.
C’est en arrivant ici qu’on a découvert que notre séjour se déroulerait en plein ramadan. Le pays étant principalement musulman (90 % de la population), ce rituel religieux qui consiste à jeûner du lever au coucher du soleil va avoir un impact direct sur notre façon de nous sustenter. Pendant la journée, les restaurants qui sont ouverts mettent un rideau sur leur devanture pour respecter les croyants qui jeûnent. Du coup, c’est pas super évident de trouver facilement des restaurants de rue comme dans les autres pays d’Asie qu’on a précédemment visités. Là encore, ça nous prendra un certain temps avant de nous adapter et d’adopter de nouvelles habitudes.
Les stars sont en ville
Quand on arrive ici, une des choses qu’on remarque en premier est l’absence quasi-totale de touristes. Ce qui se traduit par devenir un centre d’attraction permanent – que ce soit à l’hôtel ou dans les rues de Dhaka – pour la population locale, particulièrement curieuse. On nous sollicite souvent pour qu’on explique d’où on vient et ce qu’on fait ici. Quand quelqu’un nous demande ça, ça intéresse tous les gens autour. On se retrouve vite entourés – parfois submergés – de bangladais. On a l’impression d’être de véritables stars qui créent des attroupements partout où elles vont. On nous interpelle, on nous salue, on nous dévisage, on nous a même demandé un autographe ! Nombreux sont aussi ceux qui nous photographient discrètement avec leurs téléphones. D’autres, plus téméraires, nous demandent de les photographier ou de se faire tirer le portrait à nos côtés.
Toujours est-il qu’on ne passe jamais inaperçu. C’est sympa et c’est aussi parfois inconvenant. On n’est pas toujours à l’aise avec notre nouveau statut !
Mode de transports
Pour découvrir la ville, on a commencé par se balader à pieds. Vu le trafic monstre ça nous semblait être la solution la plus adaptée. Mais Dhaka est une capitale très étendue et il existe une multitude de moyen de transports pour circuler plus facilement et plus rapidement. Petit inventaire.
On trouve des rickshaws partout. Ce sont des vélos qui tractent une carriole décorée par de véritables artistes, avec un double siège et un auvent pour se protéger de la pluie. Les chauffeurs de ces rickshaws font partie des personnes le plus pauvres de la population et sont souvent mal considérés. Ils pédalent toute la journée pour pouvoir nourrir leur famille.
Viennent ensuite les CNG qui sont des mini-véhicules qui roulent au gaz naturel (Compressed Natural Gaz). Ça va plus vite mais c’est pas l’idéal pour admirer la ville. Et le fait d’être proche du sol procure une impression de vitesse parfois effrayante quand ils frôlent de gros camions. Sensations fortes garanties dans les embouteillages de Dhaka où ils trouvent toujours un espace pour se faufiler et rouler très vite !
Enfin, comme nous sommes d’intrépides aventuriers, nous avons essayé les bus. Le « transport en commun » prend tout son sens ici : les bus sont bondés, remplis à plus de 200 % de leur capacité. Claustrophobes s’abstenir. Par contre, c’est vraiment pas cher (8 centimes d’euro le trajet) et c’est l’occasion de faire de nouvelles rencontres. Premier trajet et première véritable discussion avec un jeune bangladais très content de pratiquer son anglais avec un étranger.
Une journée à Old Dhaka
Expérimenter tous ces moyens de transports nous permet de nous aventurer jusque dans les quartiers un peu plus jolis de la vieille ville de Dhaka (Old Dhaka).
La concentration de gens augmente. La taille des rues rétrécit. L’activité humaine devient frénétique. La circulation – quasiment impossible – se fait par à coups. On est en plein cœur de la fourmilière humaine. Ça pourrait être étouffant mais c’est en fait complètement dingue d’être emportés par ce flot continu de gens. Une rivière d’individus. Un torrent de corps en mouvement. Pas possible de s’arrêter ou de nager à contre-courant. Alors on se laisse porter jusqu’à trouver un coin plus calme où on retrouve nos sens. Épuisés, on se félicite tout de même d’avoir mené ce combat pour voir à quoi ressemblait ce déluge de vies.
Après cet éprouvant après-midi, on se réfugie dans une pizzéria, pour dîner dans le quartier chic et très occidental de Gulshan. On fait le grand écart dans la même journée pour avoir un aperçu des inégalités criantes de la capitale. Des bazars crasseux et miséreux de Old Dhaka aux grattes-ciel en verre impeccables de Gulshan, repère des banques d’investissement et des expatriés. De quoi attraper la nausée.
Allez, il est grand temps de quitter le vacarme permanent de la ville pour le vert de la campagne bangladaise. On monte dans un CNG direction la gare. C’est sans regret qu’on quitte Dhaka, cette ville folle, éprouvante et épuisante.